L’inauguration du crématorium du Champ de Court en octobre 2011 a remis le Mausolée Goblet d’Alviella sous les feux de l’actualité. En effet, Eugène Goblet d’Alviella (Bruxelles, 1846-Bruxelles, 1925), concepteur du Mausolée, a été le premier homme politique belge à militer pour la légalisation de l’incinération des défunts. Celle-ci n’ayant pas encore été adoptée lors de son décès, c’est à Paris qu’Eugène Goblet d’Alviella se fit incinérer.

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Ce monument, classé Patrimoine exceptionnel de Wallonie le 23 septembre 1988, a vu le jour grâce à trois hommes : Eugène Goblet d’Alviella, Adolphe Samyn (Bruxelles, 1842-Bruxelles, 1903) 1 – l’architecte – et Georges Houtstont, le sculpteur ornemaniste.

Les deux premiers cités sont bien connus ; Georges Houtstont, quant à lui, a apporté une contribution majeure à l’ornementation architecturale au cours du dernier quart du 19e siècle et pourtant son nom est quasiment retombé dans l’oubli. Grâce aux recherches entreprises par le Prof. Dr. Linda Van Santvoort (2), Universiteit Gent, Vakgroep Kunst-, Muziek- en Theaterwetenschappen, le personnage se livre au grand jour.

Georges Etienne Houtstont est né à Paris le 2 janvier 1832. Il se marie à Clichy le 27 septembre 1866 avec Clémentine Laure Thiaucourt. Le couple restera sans descendance.

Son parcours éducatif reste inconnu à ce jour.

Remarqué par l’architecte belge Henri Beyaert suite à sa participation dans les travaux de rénovation du Louvre, Houtstont se voit confier en 1862 l’ornementation du bâtiment de la Banque Nationale de Belgique.

Ce travail marque le début d’une intense collaboration avec l’architecte Beyaert et par là même d’une longue carrière en Belgique.

Il s’établit à Saint-Gilles en 1868 après y avoir installé son atelier en 1867. Il dispose également d’un entrepôt dans la même commune.

Georges Houtstont s’est bâti une belle renommée et a collaboré avec les plus importants architectes de l’époque : Pierre Victor Jamaer (1825-1902) – restauration de l’hôtel de ville de Bruxelles, Désiré De Keyser (1823-1897) – Synagogue de Bruxelles, Alphonse Balat (1818-1895) – réaménagement du Palais royal – Musée des Arts anciens, Henri Maquet (1839-1909) – immeubles symétriques à l’entrée de l’avenue Louise à Bruxelles, Jean-Pierre Cluysenaar (1811-1880) – conservatoire de musique, Louis De Curte (1817-1891) – Monument Léopold Ier à Laeken, Émile Janlet (1839-1919) – pavillon belge pour l’Exposition universelle de Paris en 1878, Joseph Poelaert (1817-1879) – Colonne du Congrès – Palais de Justice, Adolphe Samyn (1842-1903) – Mausolée Goblet d’Alviella, Charle-Albert (1821-1889) – château de Gaasbeek, etc…

Houtstont était également professeur à l’Académie de Saint-Josse-ten-Noode où il eut pour élèves, entre autres, Pieter-Jan Braecke (3)et Victor Rousseau (4).

À Court-Saint-Étienne, Georges Houtstont restera dans les mémoires comme le sculpteur ornemaniste du Mausolée Goblet d’Alviella (5) ; ce chef d’œuvre, en pierre bleue, constitue le point d’orgue de son apport à l’art funéraire.

« Le comte Eugène charge l’architecte Adolphe Samyn d’établir les plans d’un mausolée et lui indique les divers signes et emblèmes, empruntés aux principales religions et symbolisant l’Infini et l’espoir de survivance, qui devront être gravés sur le monument. L’inscription « L’Être unique a plus d’un nom » figurant au-dessus des colonnes, résume bien la pensée du comte Eugène Goblet d’Alviella. Rappelons que ce dernier fut professeur d’Histoire des religions à l’ULB puis recteur de cette université avant de devenir sénateur et ministre. Il fut aussi membre de l’Académie Royale et haut dignitaire dans la franc-maçonnerie. Il a publié de nombreux ouvrages et écrits » (6).

Il est remarquable de constater que cette personnalité, à l’âge de 40 ans, se préoccupe de faire construire l’édifice où il souhaite reposer…

Georges Houtstont a également été chargé, en 1911, de la construction du monument (7) élevé en mémoire du Lieutenant général comte Albert Goblet d’Alviella (Tournai, 1790-Bruxelles, 1873). Ce monument en pierre bleue est situé place communale.

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Rappelons qu’Albert Goblet d’Alviella a été inspecteur général du Génie, ministre de la Guerre et des Affaires étrangères, ministre plénipotentiaire, ministre d’État.

Gérard Noël (décembre 2011)
 

1 Ironie du sort liant ces deux compagnons devant la mort, Adolphe Samyn a été renversé par un tramway tandis qu’Eugène Goblet d’Alviella le fut par un taxi…
2 Linda Van Santvoort, De ornamentele beeldhouwkunst van Georges Étienne Houtstont (Parijs, 1832 – Sint-Gillis, 1912) : de synergie van kunst(ambacht) en architectuur, in : Gentse Bijdragen tot de interieurgeschiedenis, Peeters, Leuven, 2011 (à paraître), avec l’aimable autorisation de l’auteure.
3 Pieter-Jan Braecke (Nieuwpoort, 1858-Nossegem, 1938) est l’auteur de la « Victoire » en bronze du monument aux Morts des deux guerres mondiales (1912), place Communale à Court-Saint-Étienne.
4 Victor Rousseau (Feluy, 1865-Forest, 1954) est l’auteur du buste en bronze (1938) de la Reine Astrid installé au Parc de Wisterzée à Court-Saint-Etienne ; ce buste a malheureusement été volé en 2001.
5 Les travaux du Mausolée ont débuté le 10 août 1886 (jour du 40e anniversaire d’Eugène !) ; la date précise de fin des travaux est indéterminée à ce jour faute de document probant (1888 ?).
6 Jean-Philippe Lefin in www.patrimoine-stephanois.be, août 2005.
7 Commandé à Houtstont en 1910 par le Comte Eugène Goblet d’Alviella, le monument à été remis par celui-ci à la Commune de Court-Saint-Etienne le 21 juin 1911. Le monument comprend une niche qui abrite un buste en bronze (daté de 1887) du Lieutenant général dû à Jeff Lambeaux (Antwerpen, 1852-Saint-Gilles, 1908).