Dans son article « Un essai d’application de la symbolique comparée à l’architecture funéraire : cimetière de Court-Saint-Etienne », publié en 1889, Adolphe SAMYN nous livre une explication pour chaque symbole. Sur les colonnes intérieures, les images sont empruntées aux différents ordres de phénomènes naturels qui étaient pour les anciens un symbole ou un garant de l’existence future : les réapparitions périodiques du soleil et de la lune, la production du feu assimilé à la vie, les métamorphoses de certains insectes, la germination des semences et la floraison des plantes.
Voici les différents symboles et le descriptif de chacun d’eux :

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Phénix nimbé sur son bûcher
Emblème du soleil, considéré dans ses rapports avec l’idée de renaissance et personnifié en conséquence par un phénix nimbé sur son bûcher. On connaît la légende du phénix, qui, lorsqu’il se sentait mourir, s’envolait à Héliopolis où il se brûlait lui-même pour renaître, plus brillant, de ses cendres, comme Hercule sur le mont Œta. Ce mythe gréco-romain a sa source en Egypte où le phénix — l’oiseau bennou des textes — symbolisait Osiris, « le vieillard qui se rajeunit », s’abîmant, le soir, dans les flammes du couchant, pour renaître au matin, dans les feux de l’aurore, — type des destinées de l’âme humaine. D’Egypte, l’oiseau solaire passa chez les Grecs et les Romains, qui en firent un emblème de renaissance et d’apothéose, comme en témoignent des médailles de Trajan, d’Antonin le Pieux et de ses fils, de l’impératrice Faustine, etc. Il fut également adopté par les premiers chrétiens pour symboliser la destinée future des justes; on en trouve plusieurs représentations dans les catacombes.

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Le lotus
La fleur solaire par excellence, le lotus, dont le calice bleu s’ouvrait chaque matin aux rayons du soleil de l’Egypte. Ce phénomène fit aisément adopter cette fleur, sur les bords du Nil, comme un symbole de renouvellement et de renaissance.
Elle est devenue du reste, dans tout l’Orient, la fleur mystique par excellence, le support et le réceptacle des dieux — la matrice de l’univers chez les Hindous, — la fleur de l’arbre de vie chez les Sémites.

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La croix gammée
La croix gammée (par ce qu’elle équivaut au groupement de quatre gammas) orne des monnaies indo-scythes, grecques et gauloises, des fibules étrusques et romaines, des bas-reliefs hittites, des fuséoles troyennes, des poteries lacustres et des vases du premier âge de fer dans l’Europe occidentale, des amulettes islandaises et germaniques, des pierres tombales de la Scandinavie, des autels gaulois et des statues du Bouddha. Aujourd’hui encore, elle est d’un emploi fréquent chez les jaines de l’Inde ainsi que chez les bouddhistes du Thibet, de la Chine et du Japon. On prétend l’avoir observée jusque chez les Ashantis de l’Afrique occidentale. — II est assez naturel que les premiers chrétiens l’aient adoptée pour dissimuler la croix sous une forme qui n’avait rien de suspect aux yeux des païens; aussi l’a-t-on retrouvée sur plus d’une sépulture des catacombes. Ce symbole se trouve en rapport avec l’idée de survivance, et, la croix gammée s’est répandue comme un signe de salut, de bénédiction, de prospérité.

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Le croissant lunaire
Le croissant lunaire, qui a fourni à tant de peuples, un symbole de palingénésie. Non seulement la lune paraît, disparaît et reparaît dans une révolution quotidienne à la façon du soleil, mais encore, par le phénomène mensuel de la lunaison, elle nous présente l’image d’un corps céleste qui croît graduellement et décroît de la même manière, pour reprendre, après une disparition totale, le cours d’une destinée qu’on dirait calquée sur la vie de l’homme. Il n’est donc pas étonnant que la lune ait été mise en rapport avec les idées de renouvellement et de résurrection, si même elle n’a contribué à développer l’idée première d’une vie future. Chez les Grecs, Hécate était la déesse des enfers. Chez les Égyptiens, le dieu lunaire Aah présidait au rajeunissement, à la renaissance. Chez les Babyloniens. Allât, la déesse lunaire du monde souterrain, gouverne l’empire des morts et garde jalousement, avec les esprits de la terre, la source de vie, dont les eaux permettraient aux défunts de reprendre leur existence.

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Un papillon
La destinée de la chenille, devenue papillon après avoir traversé l’état de chrysalide, a été souvent invoquée pour expliquer comment la mort peut n’être qu’un simple passage à quelque forme supérieure d’existence. Aussi les anciens se sont-ils servis du papillon pour symboliser l’âme. Il existe des sculptures antiques où l’âme est figurée par un papillon voltigeant au-dessus d’un tombeau ou d’un squelette. Psyché est souvent représentée avec des ailes de papillon dans les monuments funéraires et, sous cette forme, elle a passé dans la symbolique des chrétiens, qui, à l’instar des Grecs, regardaient l’âme comme un papillon divin, enfermé dans la chrysalide du corps jusqu’à l’heure de la délivrance.

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Épi de blé
Les phénomènes de la germination fournissent également une image qu’il est facile de rapporter à la destinée humaine. On connaît le mythe de Proserpine, qui, enlevée par Pluton, obtient de quitter pendant la moitié de l’année le royaume souterrain de son ravisseur, pour séjourner près de sa mère Cérès. Cette destinée du grain de blé, moissonné en automne, et enseveli dans la terre, d’où il sortira au printemps sous forme d’épi, a été utilisée de bonne heure, dans les mystères de la Grèce pour symboliser le sort qui nous attend au delà du tombeau. « Déméter, dit Isocrate, gratifia nos ancêtres dès deux plus beaux présents que les dieux puissent faire aux hommes : l’agriculture qui nous élève au-dessus de la condition des bêtes, et les mystères qui assurent aux initiés les plus douces espérances, non seulement pour la fin de cette vie, mais encore pour toute la durée des temps.

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Une torche renversée
Une torche rallumée- une torche renversée symbolisent l’idée de renaissance, de transmigration, de continuation personnelle, images dont la symbolique grecque s’est servie pour figurer la mort et la vie.

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Une torche rallumée
Une torche rallumée- une torche renversée symbolisent l’idée de renaissance, de transmigration, de continuation personnelle, images dont la symbolique grecque s’est servie pour figurer la mort et la vie.

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La croix ansée
La croix ansée ou « clef de vie » des monuments égyptiens, qui fut adopté par les Phéniciens et par les Assyriens, était placée, en Egypte, dans la main des dieux qui la faisaient passer sous les narines des défunts pour les éveiller à une vie nouvelle. Ce signe fut utilisé par les chrétiens d’Egypte, soit pour indiquer que le Christ était le principe de vie, soit pour symboliser le dogme de la résurrection, soit simplement comme substitut de la croix. L’origine du symbole est, selon certains auteurs, dans la clef qui servait à ouvrir les écluses du Nil lors des inondations annuelles. Cette clef, qui rendait ainsi au pays la fertilité et la vie, serait devenue la clef qui ouvrait aux défunts la porte de l’existence future — selon d’autres, elle serait l’image du nilomêtre.

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La faux
La faux symbolise à la fois le temps et la mort.

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Le serpent qui se mord la queue
Le serpent qui se mord la queue, symbole traditionnel de l’éternité et de l’infini, représente ce qui est peut-être l’envers de l’existence actuelle : l’être soustrait à toutes ses limitations, — l’infini, l’absolu.

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Un sarcophage d’où sort une branche d’acacia
Un sarcophage d’où sort une branche d’acacia. Cette représentation figurée est empruntée aux monuments funéraires de l’Egypte, où elle signifiait — au sens métaphysique comme au sens littéral — que la vie sort de la mort. La branche d’acacia rappelle également le rameau qui guidait les initiés des mystères antiques dans leur voyage au monde souterrain des âmes, d’Eleusis, le thyrse dionysiaque, le gui druidique, le rameau d’or que Virgile met aux mains d’Énée dans la descente de son héros aux enfers. Ainsi que le pensaient les anciens, la mort n’est-elle pas une initiation ?

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Un Arbre de vie
À l’extrémité de la plate-forme se trouve la stèle destinée à recevoir le nom des défunts. Aux deux côtés de cette. stèle est gravé un Arbre de vie, dans la forme artistique et hautement conventionnelle, que les Assyriens ont donnée à ce vieux symbole sémitique, et que les Chaldéens reproduisaient sur leurs sarcophages, comme une promesse d’immortalité.

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Étoile à cinq branches
La stèle elle-même est surmontée d’une étoile à cinq branches dont l’intérieur contient une ancre en relief; ce qui est comme la conclusion de toute cette symbolique.
C’est l’emblème de l’espérance : « l’espérance, que nous tenons comme une ancre sûre de l’âme et qui pénètre jusqu’au delà du voile. » (Epitre aux Hébreux, VI, 19.) — Devant le mystère de la mort, la révélation perd de plus en plus sa créance; la science, consciente de ses propres bornes, doit se proclamer impuissante à nous servir de guide; la philosophie elle-même ne peut dépasser la double affirmation que le fond de l’être nous est inconnu, et que rien ne se perd dans la nature. Mais, là où la foi manque et où la certitude est impossible, l’espérance nous reste.